Peter Pan Club

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ubik
le 03/06/2009
Salut,

Ce n'est pas que ça engage mon estime de moi à un tel point. Mais il faut être lucide : si on créait un club des divers Peter Pan de la terre, je ne serais pas le dernier inscrit.

Par moments, ça me pose problème. Surtout quand j'ai affaire à des gens foncièrement différents de moi, et auprès desquels je me sens démuni, mal armé, en position d'infériorité. Des gens sérieux, adultes, responsables et tutti quanti, qui en imposent par leur hautes fonctions et leur sens aigu du devoir. Des gens qui assurent, qui sont des hommes, des vrais.

Cependant, il me faut dire aussi que lorsque j'ai vécu des épreuves très dures, je connais beaucoup de ces gens qui n'auraient pas encaissé comme moi je l'ai fait. Il semble que la précarité, ma difficulté à trouver ma place dans un tel monde, m'aient en quelque sorte aidé. Habitué à des situations inconfortables, à un statut souvent dévalorisé, déclassé, je me suis relativement bien adapté à ces épreuves qui auraient détruit plus d'un macho ou d'un mariole que je connais. Par ailleurs, je sais aussi que ces gens-là ont eu aussi un côté infantile en eux, mais qui se manifeste sous un autre forme.

Ce qui me gêne, c'est une relative incapacité à assumer seul. Mes parents sont là, qui m'ont toujours surprotégé et j'ai l'impression que le jour où je ne les aurai plus, je ne saurai pas me débrouiller, à retomber sur mes pattes. Je ne sais pas.

Le fait est que j'ai les défauts de mes qualités : immature, jusqu'à un certain point. Mais créateur comme aucun de ces "adultes" que je cotoie ne le seront jamais. Non seulement ils ne créeront rien de ce que je suis capable de créer, non seulement ils en sont incapables, mais ils sont également incapables de seulement l'appréhender.

Alors disons que j'ai mon fonctionnement, avec ses vicissitudes et ses joies. Il faut savoir accepter ce que l'on est. Il y a en moi des zones de fragilité, mais aussi des richesses qui sont inaccessibles à ceux qui, du haut de leur maturité, me paraissent bien pauvres et étriqués. J'envie parfois leur assurance, leur côté mâle et adulte. Mais je ne changerai pas pour devenir comme eux, si je devais perdre ce que je porte en moi. De toutes façons, ai-je le choix ? La vie m'a fait tel que je suis. En être conscient me permet d'atténuer, de relativiser. Je ne crois pas au changement en profondeur. On ne change que si on le désire réellement, et même comme ça, on n'y arrive pas toujours. J'ai dépassé l'âge où on peut modifier son psychisme en profondeur. Les psys que j'ai fréquentés, ils furent nombreux, m'ont parus plus ou moins efficaces.

Je suis une version atténuée de Peter Pan. J'ai connu beaucoup de créateurs qui vivent complètement dans leur petit monde. Eux sont des Peter Pan à 100 pour 100. Je les envie, car au moins ils créent sans se pose de questions ni douter d'eux. Moi je suis le cul entre deux chaises. A la fois avec mes valeurs, mais capable de comprendre que d'autres diffèrent de moi en tous points. Et surtout, facilement en proie au doute, n'étant jamais sûr d'avoir fait le bon choix. Aujourd'hui je consacre mon énergie à des tâches qui me paraissent importantes. Demain, peut-être les jugerai-t-elles dérisoires, obsolètes ? Comment savoir si on est dans le bon chemin ?

Tout est si dérisoire. Peut-être que les buts que je me fixe, créer ceci ou cela, laisser telle ou telle oeuvre dont je pourrais me sentir fier, est aussi absurde que le combat que mènent certains pour devenir les caïds dans leur domaine, avoir une belle bagnole ou les plus belles nanas, détenir un pouvoir quel qu'il soit, les honneurs, l'autorité, la capacité de décider.

Je ne sais pas. Ce texte n'est qu'une question ouverte. Un prétexte à réfléchir à tout ça. Si tant est qu'on puisse y réfléchir.

Ceux que ça tente peuvent venir y ajouter leurs commentaires.

Paix à tous,

Ubik.
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